Jamais, depuis longtemps, élections ne se seront tenues dans un contexte aussi dramatique : crise des migrants, attentats terroristes, état d’urgence constituent une terrible toile de fond de la consultation régionale, et malheureusement, la question régionale n’aura pas été au cœur ni de la campagne de plusieurs candidats ni des réflexions des électeurs.
S’agissant des résultats du premier tour, les sondages avaient raison. Nul ne peut dire avoir été surpris ! Les risques étaient connus ; je les avais moi-même maintes fois rappelés. Le tripartisme, dorénavant, de la vie politique française, couplé avec le fonctionnement institutionnel bipartiste de la Ve République, crée une situation nouvelle et disqualifie quasi automatiquement pour le second tour la troisième liste. La division de la Gauche au premier tour était suicidaire !
Pierre de Saintignon aura été courageux, combatif, il aura fait ce qu’il a pu. Mais il partait dans cette bataille avec le handicap – terrible – d’une Gauche divisée (elle avait pourtant géré, unie, la Région !), et de devoir la mener contre une icône médiatique, Marine Le Pen. Pierre a toujours été un (formidable) travailleur de l’ombre : les 13 % de l’Aisne, par exemple, soulignent ce manque de notoriété. Ce n’est pas lui faire injure. Simplement, pour l’électeur, le volet médiatique paraît plus important que les dossiers de fond ! Et c’est bien dommage car la politique, la vraie, ce n’est pas le superficiel, les slogans à la Le Pen, c’est la vie quotidienne des gens comme s’y intéresse Pierre !
Cinq constats s’imposent à la lecture des résultats du scrutin :
> Dispersée, la Gauche se suicide ! Les Verts portent une lourde, très lourde, responsabilité, en particulier Sandrine Rousseau ! Vice-présidente sortante de la Région, obsédée par l’idée de faire un coup politique, visant à faire des voix pour les Verts sur le dos des socialistes (voire à réaliser après le premier tour, un coup à la Blandin en 1992, pour capter (à son profit ?) la présidence de la Région !), elle aura fait disparaître finalement non seulement les écologistes, mais aussi toute la gauche de la Région ! En plus, à 4,8 %, elle ne sera pas remboursée de ses frais de campagne ! Pitoyable résultat !
Pourtant, avec les listes PdS (18,2 %), Verts (4,8 %), Front de Gauche (5,3 %), une liste unique était à 28 ou 29 %. Avec la dynamique de rassemblement de la gauche, elle pouvait même atteindre 30 ou 31 % ! Au soir du premier tour, la situation de la Gauche aurait été tout à fait différente de celle d'aujourd’hui : le troisième, c’était la Droite, Xavier Bertrand, et pour le second tour, tout restait possible, y compris une victoire de Pierre de Saintignon !
Quelle connerie, cette division mortifère ! Cela coûte cher ! Pierre Mauroy, reviens !
> A Wattrelos, les suffrages socialistes se tiennent plutôt bien au regard du contexte et de l’environnement. A 27,5 %, le pourcentage est supérieur de 9,5 points au résultat régional, et très nettement au-dessus de nombre de communes voisines. Pour autant, bien sûr, il n’y a pas de déni de ma part : les résultats ne sont pas bons, nationalement et localement, pour mon parti. François Hollande est en train de redresser en profondeur la situation de la France, gravement obérée par le quinquennat de N. Sarkozy, mais les électeurs ne le perçoivent pas. Ils ont choisi de s’abstenir trop largement.
> Au sein du PS, les frondeurs n’ont pas été mieux lotis ! A Denain, où ma collègue députée-maire n’a cessé de critiquer le gouvernement et de joindre sa voix aux frondeurs, le FN est à 47,7 % (+ 2 points par rapport à Wattrelos) et PdS à 24,9 % (- 3 points par rapport à Wattrelos). Elle était pourtant n°2 sur la liste de Pierre de Saintignon ! L’électorat ne lui a pas fait grâce de ses critiques, en terme de résultats. Ces frondeurs, par leurs critiques à l’intérieur même de notre groupe parlementaire, minent de manière irresponsable la crédibilité d’ensemble de l’action gouvernementale. Ce comportement indiscipliné de certains députés socialistes est incontestablement incompris des électeurs et militants socialistes. Il contribue à détourner de nous l’électorat. C’est bien regrettable ! Au demeurant, il ne sert pas ses auteurs.
> Il n’y a pas de demande de l’électorat d’une politique plus à gauche. Les résultats des autres forces de gauche le prouvent. Ils ont voulu jouer leur propre partition dans cette campagne, ont fait leur liste pour profiter de la faiblesse des socialistes, revendiquant une politique plus à gauche. C’est raté ! Ni les Verts (qui ne dépassent pas 5 % !), ni les communistes ne progressent, bien au contraire. A Wattrelos, les premiers sont à 4,3 %, les seconds à 3,9 % ! Tout ça pour ça ? Quel gâchis !
> Enfin, le Front National, s’il se banalise en France et dans la Région, et réussit des pourcentages importants, n’a pas mobilisé ce 6 décembre 2015 à Wattrelos son nombre d’électeurs le plus élevé : en 1995 (1er tour de la présidentielle), le FN avait réuni 5 849 électeurs, et 5 808 en 2015 pour ce premier tour des régionales. La différence : en 1995, il pesait 26,7 %, contre 45,5 % en 2015 ! Entre temps s'est (trop longuement) développée l’abstention, notamment de gauche !
Sous l’influence de Marine Le Pen, le FN porte un discours attrape-tout : aux pauvres, il promet d'être moins pauvres ; aux classes moyennes, il promet de baisser les impôts ; aux plus riches, il promet de supprimer l’impôt sur la fortune… En fait, sa ligne politique, c’est dire à chaque catégorie sociale ce qu’elle a envie d’entendre ! Mais sur le fond, rien de sérieux, rien de financé. Ces promesses ne sont qu’illusions, uniquement destinées à utiliser électoralement des mécontentements. Elles ne disent rien qui soit faisable ou réaliste !
C'est ça, le plus douloureux. Le projet le plus sérieux, crédible, financé, c’était bien celui de Pierre de Saintignon. Moi-même, je vis très mal les résultats à Beaulieu. Le quartier a bénéficié ces toutes dernières années du (large) soutien financier de la Région de Gauche : crèche, bibliothèque, centre social, école Brossolette reconstruite et financée à 80 % par la Région ! La population s'est pourtant abstenue de voter aux deux tiers. Et deux tiers des votants ont accordé leurs suffrages au FN ! Piètre récompense de tout le travail entrepris par la Région. Pourtant nous l'avons dit, écrit. Mais qui écoute, qui lit encore ? Tout cela mérite réflexion.
Au terme de ce premier tour, je veux, avec Dany Cuchère, tous les militants socialistes et de progrès wattrelosiens, toute mon équipe municipale, féliciter très chaleureusement, très amicalement notre candidate sur la liste de PdS, Soraya Fahem. Elle s’est battue, a fait honneur à sa famille, à la Gauche et à Wattrelos !