Encore une bien triste nouvelle en cette fin avril : la doyenne de la Résidence du Touquet, mais aussi et surtout des Wattrelosiens, Estève Verwaerde, nous a quittés, quatre mois à peine avant ses 105 ans.
Je suis très triste car je l’aimais beaucoup, Estève, et je n’étais pas le seul tant sa personnalité, sa gentillesse, son sens de l’amitié savaient séduire. A sa Résidence (elle était l’une des toutes premières résidentes !), elle faisait l’unanimité : conviviale, friande d’animations, elle était de tous les repas, et descendait pour chacune des animations, fidèlement, et encore ces derniers mois. Dynamique, allant régulièrement à la rencontre des autres résidents, elle était un « personnage » de la Résidence et du quartier.
Elle s’était même plus particulièrement liée avec sa voisine, Alfreda Carette, plus jeune… d’à peine un an, et qui doit avoir également le cœur bien lourd, tout comme son petit fils, René, responsable logistique de notre SAVA, à la mairie, et Nadia, son épouse : elle était si fière quand je les ai mariés. Je pense bien à eux en ces douloureux instants.
Je me souviens que le jour des 104 ans d’Estève, en septembre dernier (c’était le jour de la rentrée des classes), je m’étais rendu à son chevet, à l’hôpital de Roubaix, où elle avait été momentanément hospitalisée ; cela faisait plusieurs années que je ne manquais aucun de ses anniversaires ! Fidèle, c’est l’adjectif qui caractérise le mieux Estève. A chaque 1er mai, elle me guettait lorsqu’à la résidence je portais le muguet, souvent avec un café ou une soupe. A chaque cérémonie des vœux au personnel municipal, tant qu’elle l’a pu, elle était là, à Salengro, au 1er rang !
En 2015, quelques semaines à peine après mon accident de moto, c’est à Estève que j’avais réservé ma toute première sortie de l’hôpital. C’était symbolique, mais surtout très affectif : elle n’aurait pas compris que je ne sois pas là pour son anniversaire. Je me l’étais promis : je l’ai fait ; c’est debout que j’étais venu lui faire « eun’ grosse baisse » pour ses 102 ans !
Je lui rappelais à chaque fois, lorsque nous fêtions son anniversaire, qu’elle était née l’année où Charlie Chaplin faisait ses débuts au cinéma. Roland Garros survolait la Méditerranée pour la première fois, le réfrigérateur électrique était inventé, Alain-Fournier publiait Le Grand Meaulnes et Marcel Proust Du côté de chez Swann… 1913 est aussi l’année de naissance d’Albert Camus, Charles Trenet, Jean Marais. Et avec elle, chaque année à son anniversaire, on parlait de son bon appétit, de sa gourmandise pour les bonnes viandes rouges, et Alfreda venait nous chanter « La p’tite Thérèse », et nous riions tous de bon cœur !
Sacrée Estève, qui aura connu une très longue vie, évidemment pas exempte de difficultés : mariée à 17 ans, elle perdit son mari seulement trois ans plus tard. Remariée, elle tint la quincaillerie de la rue des longues haies, à Roubaix durant une vingtaine d’années, avant de devenir agent du CCAS de la Ville de Wattrelos jusqu’à la fin de sa carrière. Elle avait été très affectée par la disparition de René, son si proche époux, et surtout de sa fille : cela l’avait profondément touchée, et je me souviens qu’elle m’avait pris la main, en me disant que ce n’était « pas juste » qu’elle, plus que nonagénaire, fût encore là, tandis que sa fille était partie. Moment d’émotion pour moi, jamais je n’oublierai les yeux de cette maman, si triste de la mort de « son » enfant septuagénaire.
Après la disparition de René Plovie la semaine dernière, c’est une autre « figure » communale qui s’éteint, mais que Wattrelos, de nouveau, n’oubliera pas.
C’était une maman, une mamie, une grand-mamie adorable : je me sens orphelin d’elle !
Adieu Estève, ta vigueur, ton sourire et ton goût de vivre nous marqueront encore longtemps.
Repose en paix à présent, tu l’as bien mérité.