Ce soir, je suis l’invité du dîner-débat de l’association Parole citoyenne, à la MEP de Lille, et je planche sur le thème : « Crises, dettes et banques : le citoyen est-il pris dans une tempête ? ».
Le sujet est lourd car les problématiques embrassées sont complexes et mon objectif, pour les deux heures de mon intervention et du débat qui s’en suit, est de permettre à mon auditoire de disposer des clés de lecture des grandes évolutions économiques de ces dernières années, et des questions-clés qui se posent en ce début 2012, en France et dans le monde.
S’agissant des crises, nous sommes passés d’une crise à l’autre. D’abord ce fut celle née aux Etats-Unis dans la période 2006-2007, qui s’est propagée au système bancaire mondial par la diffusion des actifs dérivés des subprimes. Ensuite, autre crise, celle des dettes publiques, avec un épicentre en Europe à cause des doutes nés sur la soutenabilité de celle de la Grèce, puis de l’Irlande et du Portugal.
La dérive des dettes souveraines est en effet préoccupante. En Europe, les Etats les moins endettés sont au Nord, les plus endettés au Sud. La Grèce est à 142,8 % du PIB en 2010, l’Italie à
119 %, l’Allemagne à 83,2 %, la France à 82,3 %… et l’Estonie à 6,6 % ! L’analyse de la dette publique française, en véritable explosion (+ 4,7 % par an, par rapport au PIB depuis 2007 ; du jamais vu depuis 30 ans !), est malheureusement significative car loin de se réduire, elle va mécaniquement continuer à s’alourdir et, à défaut d’une vraie reprise de la croissance économique, devenir étouffante pour toute marge de manœuvre budgétaire. Il y a risque majeur de surendettement durable ! Avec, en 2012, un besoin annuel de financement de l’Etat sur les marchés de 184,1 Mds € (je rappelle que le total de l’impôt sur le revenu perçu en France est de 58,4 Mds € !).
Pour couvrir leurs besoins de financement, les Etats européens de la zone euro devront, globalement, lever 810 Mds € auprès des investisseurs (notamment étrangers).
Malheureusement, alors qu’il leur faut financer l’économie et la dette publique, les banques sont sous contraintes, par manque de liquidités (repli des investisseurs en dollars) et du fait des nouvelles contraintes prudentielles (Bâle III, qui les contraint à augmenter leurs fonds propres). De fait, si, avec ses décisions de novembre et février, la Banque centrale européenne aura injecté à bon prix (1 %), près de 1 000 Mds € de liquidités supplémentaires, des risques subsistent de voir les banques réduire certains financements.
Au total, si des incendies ont été éteints dans la zone euro, donnant un sentiment d’apaisement, des questions de fond demeurent en ce début 2012 : la gouvernance de la zone euro ; la stimulation indispensable de la croissance (comment faire si, plan après plan, l’austérité s’ajoute à l’austérité) ; et surtout les deux très lourdes inconnues mondiales : l’énorme dette américaine (15 000 Mds $ fin 2011), en plein dérapage, et la plus énorme encore dette publique japonaise (204 % du PIB) qui, si elle devait connaître un défaut de paiement, signerait immédiatement un arrêt de mort clinique du système financier mondial…
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