Cette semaine, le ministre du budget a présenté le programme pluriannuel des finances publiques, dont le cœur est évidemment le budget triennal 2011-2013 de l'Etat. En le regardant de près, on sait à quoi s'en tenir pour les années à venir. Et ce n'est pas réjouissant, car 2011-2013, ce seront, dans le budget de l'Etat, plus d'argent pour payer la dette, moins de fonctionnaires, moins de crédits budgétaires surtout pour les politiques sociales, moins de dotations aux collectivités locales.
1. Davantage d'argent pour payer les charges d'intérêt de la dette.
Les charges d'intérêt de la dette (42,4 Mds€ en 2010) devraient – d'après le Gouvernement lui-même ! – augmenter en valeur de plus de 9 % en moyenne par an, soit cinq fois plus vite que l'inflation ! C'est la conséquence directe de l'explosion de l'encours de dette depuis 2009 (que j'ai déjà souligné dans de précédents articles), à laquelle s'ajoute la hausse attendue des taux d'intérêt et celle de l'inflation.
Ainsi, les intérêts payés sur la dette vont atteindre 45,4 Mds€ en 2011, 50,5 Mds€ en 2012, et 55,2 Mds€ en 2013.
Ce seront 13 Mds€ de plus que l'Etat va devoir consacrer à payer les intérêts de la dette en trois ans ! Rappelons que le budget de l'Education nationale est de 44,1 Mds€, et donc que dès 2011, la charge de la dette coûtera plus chère que toute l'éducation : un triste symbole !
2. Mais beaucoup moins de fonctionnaires.
Déjà, en 4 ans, depuis 2007, les suppressions d'emplois publics se sont accélérées : 100 000 postes en moins (dont – 33 493 en 2010). Avec le nouveau plan triennal, c'est en trois ans que le Gouvernement compte à nouveau supprimer 100 000 emplois publics : - 31 400 en 2011, -32 800 en 2012, et – 33 000 en 2013 (dont la moitié, chaque année, dans l'Education nationale !). Avec ces chiffres, l'Etat confirme qu'il conduit vraiment le premier plan social du pays car sur le quinquennat de Nicolas Sarkozy, ce seront 200 000 postes qui auront été supprimés !
Pas étonnant, dès lors, qu'il y ait moins de policiers dans nos rues, d'enseignants dans nos lycées, collèges et écoles ou des files d'attente jusque dans les administrations fiscales !
Cela ne va pas s'arranger dans ces domaines, puisque sur les 31 400 suppressions de postes en 2011, ce seront - 16 000 dans l'Education nationale, - 3 127 dans les administrations financières, et - 1 600 pour le ministère de l'intérieur. A ceux-là s'ajoutent (si j'ose dire) - 8 250 postes à la défense, - 1272 au ministère de l'écologie, ou encore - 272 au ministère du travail (ce n'est pas comme cela que les inspecteurs du travail vont voir se renforcer leurs moyens).
3. Et surtout des coupes sombres dans les politiques sociales.
Si le Gouvernement va baisser les crédits de plus de la moitié des missions de l'Etat, ce sont surtout les ministères qui portent les politiques sociales qui voient le plus leurs crédits diminuer :
(en Mds €) | 2010 | 2013 | | Ecologie | 9,24 | 8,70 | - 740 millions € | Enseignement | 44,14 | 44,05 | - 90 millions € | Travail, emploi | 11,25 | 9,10 | - 2 150 millions € | Ville et Logement | 7,81 | 7,37 | - 440 millions € | |
Là encore ce n'est pas neutre. Car ce sont des politiques de la vie quotidienne qui vont être touchées.
D'abord l'écologie. On est loin du Grenelle de l'environnement ! La baisse des crédits est de -5,8 % sur trois ans, l'une des plus importantes !
Pour la ville et le logement, la baisse de 5 %, avec notamment une diminution des aides au logement des étudiants.
Mais la ponction la plus sévère frappe les crédits du travail et de l'emploi, avec des contrats aidés qui passeront de 400 000 en 2010 à 340 000 en 2011, 270 000 en 2012 et 200 000 en 2013 (avec une part de salaire payée par l'Etat qui passera de 90 à 80 %), ou le ralentissement de la progression de l'AAH (Allocation Adultes Handicapés) ; ou encore la réforme de certains dispositifs d'exonérations sociales.
4. Et pour les collectivités locales, moins de dotations aussi !
La mission Relation avec les collectivités locales passe de 2,62 Mds€ en 2010 à 2,52 Mds€ en 2013 : cela veut dire 100 millions d'euros de moins pour les dotations de l'Etat aux collectivités locales. Quand on sait que ce chiffre global englobe le FCTVA (poussé par les dépenses d'investissement) et les dotations de péréquation (naturellement en hausse), cela veut dire que les autres dotations, forfaitaires et de compensation, vont baisser plus fortement encore. Cela veut dire surtout que les collectivités locales ont du souci à se faire pour boucler leur budget sur cette période 2011-2013.
Tout cela dessinera une France de demain où il y aura moins de services publics de proximité, plus de pauvreté, plus de chômage et moins d'investissements publics… et donc moins de croissance… et donc plus de chômage, etc. Et si, avec ce coup de rigueur brutal, ce Gouvernement était en train d'enfoncer la France dans la crise ? Je le redoute…