Lundi matin, très tôt, je suis l’invité de France Bleu Nord pour commenter les résultats du 1er tour de la Primaire. Sur le fond, ma conviction est faite depuis longtemps : pour le Parti socialiste voter sur sa gauche, et déporter le centre de gravité du Parti vers la gauche de la gauche, cela ne peut pas accroître les chances de gagner la Présidentielle : au contraire, ce serait renoncer à vouloir la gagner ! Et cela, je m’y refuse !
Voilà pourquoi, pour moi c’est clair : dans cette Primaire, Hamon c’est non, franchement non !
> Parce qu’Hamon fait l’impasse sur la Présidentielle de 2017
Il y a une gauche qui préfère râler que gérer, critiquer que gouverner. Cette gauche-là se complait dans l’opposition, Mélenchon en est l’exemple par nature ! Et pour cette gauche, il ne faut pas gagner l’élection, mieux vaut être dans l’opposition, c’est plus confortable ! On prend moins de coups !
Et c’est bien la trajectoire d’Hamon !
D’ailleurs, lui-même le reconnaît. Dimanche soir, à qui se compare-t-il ? Au travailliste anglais Jeremy Corbyn, et au démocrate américain, Bernie Sanders ! Deux perdants ! Ils ont tous deux fait donner un coup de barre à gauche à leur parti : résultat, la droite dure gouverne dans les deux pays, Theresa May en Grande-Bretagne, et Donald Trump aux Etats-Unis !
La belle réussite ! A se déporter à gauche, on ouvre un boulevard à la droite !
> Parce que le projet d’Hamon est un socialisme de l’illusion, de l’irresponsabilité et du délire
Benoît Hamon dit avoir deux projets, l’un social, l’autre écologique. Certes, mais quid de la question financière, quid de la question économique ? Pour sympathiques que soient ses utopies qui constitueraient certainement des références pour une Contribution au Congrès socialiste, et capables de faire rêver et mobiliser des militants avides (et ils ont raison) de changer la vie, elles ne sont en rien réalistes, ni au regard des équilibres économiques français, ni des réalités internationales ! Ses propositions ne sont que dépenses nouvelles, impôts nouveaux, charges nouvelles pour les entreprises et ménages français.
Supprimer le CICE ? Ce sont 40 Mds de charges en plus pour les entreprises, une dégradation de leur compétitivité, des pertes d’emplois rapidement. Dépenser et creuser les déficits publics, cela veut dire recommencer à endetter la France (alors que les Français, sous le quinquennat de François Hollande ont, par leurs efforts, enfin réussi à stopper la course folle de la dette ! Enfin elle diminue ! Et il faudrait tout remettre en cause ?).
Sait-il, Benoît Hamon, que la France emprunte encore chaque année 180 Mds € sur les marchés financiers pour se financer ? Aujourd’hui, grâce à la crédibilité de la politique menée, les taux d’intérêt payés par la France sont très faibles ! Si, avec Hamon, la France perd cette crédibilité en se lançant dans des dépenses inconsidérées, elle paiera plus cher l’argent qu’elle a besoin d’emprunter. Or, une augmentation de + 1 % des conditions d’emprunt, ce serait en deux ans, + 4 Mds € de dépenses d’intérêts en plus à payer pour le Budget de l’Etat ! Et + 1 %, c’est vite fait. Alors, comment va faire Hamon pour payer ces intérêts, il va encore augmenter les impôts ? Lui qui ne cesse de critiquer les banques, pourquoi préfère-t-il payer des intérêts aux banquiers plutôt que de donner de l’argent pour faire fonctionner les services publics, ouvrir des classes dans les écoles, payer des policiers ?
Et on ne peut qu’avoir peur lorsqu’il parle de ne pas rembourser les dettes : qui peut croire qu’une telle position va renforcer la crédibilité de la France ? Le projet d’Hamon va vite ramener la France au rang de la Grèce.
Il dit que « les vieilles recettes ne marchent plus » : sauf que les vieilles recettes, c’est lui !
> Parce qu’il ne sera que le « porteur d’eau » de Mélenchon
Encore une fois, se déporter vers la gauche de la gauche, c’est se résoudre à ne pas gagner la Présidentielle ! Car enfin, regardons la réalité en face : Mélenchon est à 13/15 % ; les enquêtes placent Hamon à 5/7 % ; ensemble cela avoisine les 20 % ! Comment fait-on avec ce « plafond de verre » de la gauche de la gauche pour atteindre 51 % et gagner la Présidentielle ?
A vrai dire, comme les communistes pour les vingt premières années de la Vème République avec les gaullistes (époque ou l’existence d’un fort parti communiste incapable de se hisser à plus de 50 % a permis à la Droite de se maintenir au pouvoir), Mélenchon est aujourd’hui le meilleur allié de Fillon ! Et Hamon risque de l’être avec lui ! Car dans la critique et la protestation, Mélenchon sera toujours meilleur qu’Hamon, lequel sera distancé par le premier.
Renforcer la gauche de la gauche, c’est renoncer à figurer au 2nd tour de la Présidentielle, et donc à la gagner !
Et cela, je ne l’accepte pas ! Maire d’une ville ouvrière, où des gens sont en souffrance, dans la pauvreté, je n’ai pas envie qu’ils souffrent demain davantage encore : moins de fonctionnaires, moins d’hôpitaux, moins d’enseignants, moins de dotations aux collectivités locales, moins de contrats aidés… moins de moyens pour permettre à ceux qui ont peu de vivre mieux, c’est cela le programme Fillon ! Renforcer Mélenchon, c’est permettre à Fillon de gagner l’élection présidentielle et d’appliquer son programme de purge.
> Enfin, parce que dans les grands rendez-vous du quinquennat, Hamon n’a pas été là !
Moi, je suis un député de la majorité, fidèle et loyal au Président et à ses gouvernements, pour qui j’ai été candidat ! Mais je garde de cette législature le pire de mes souvenirs politiques : avoir été trahi par les nôtres ; par ces « frondeurs » qui, de nos rangs, ont refusé les votes de la majorité, n’ont cessé de désobéir, de s’abstenir, parfois de voter contre, de ne pas respecter les règles de la majorité tout simplement ! Leur comportement a été de l’irresponsabilité politique. Benoît Hamon a souvent été de ceux-là, ses amis toujours !
Et c’est inacceptable. Car ce sont ces comportements-là qui ont pourri la vie du quinquennat, qui ont savonné la planche de François Hollande et des socialistes en général, qui ont entaché la crédibilité de l’action gouvernementale. Quand, dès qu’une mesure est annoncée, des députés socialistes se précipitent devant les caméras pour la critiquer, comment veut-on que l’opinion publique la positive ? L’électeur de gauche s’est trouvé perdu devant ces discours contradictoires, qui étaient du pain bénit pour l’opposition ! Quand ces députés, dans l’hémicycle, quémandaient des voix de la Droite, ou ajoutaient les leurs à la Droite pour faire battre le gouvernement, c’était à vomir !
Sauf qu’Hamon a souvent été de ceux-là ! Ses amis toujours. Ainsi, en 2014, il s’abstient sur la déclaration de politique générale du gouvernement Valls ; il s'abstient sur le volet recettes de la Loi de Finances pour 2015, sur la Loi de Finances 2015 elle-même et celle de la Sécurité Sociale (ce qu’il votera en revanche en 2016 et 2017). Il vote en revanche la Loi de Finances pour 2016, mais s’abstient sur celle de 2017 : comprenne qui pourra !
Sur la sécurité des Français, c’est consternant : il n’a pas participé aux votes sur la prolongation de l’Etat d’urgence, ni en février, juillet et décembre 2016 ! Il a voté contre la Loi Constitutionnelle de protection de la nation (février 2016), et s’abstient sur la Loi renforçant la lutte contre le crime organisé et le terrorisme (mars 2016) !
Et dans le contexte d’aujourd’hui, de tensions internationales et de terrorisme environnant, Benoît Hamon prétend être candidat à la Présidence de la République ? Non, ce n’est pas possible !
En ce début 2017, j’ai peur pour mon pays : avec le Pen, c’est la rupture de la cohésion sociale et le chaos économique ; avec Fillon, la purge sociale ; avec Mélenchon, l’impuissance sociale et le naufrage économique. Le camp du Progrès ne peut se résoudre à aucune de ces perspectives pour la France.
Rien n’est encore joué ; dans le match « présidentielles », on n’est pas encore dans la finale, ni dans la demi-finale ; heureusement, mais dès maintenant, il ne faut pas se tromper de chemin, sinon ce sera l’impasse ! Pour moi, c’est clair, Hamon, c’est non !