Madame la Députée,
Monsieur le tout nouveau Conseiller départemental (j’excuse Soraya Fahem, retenue par l’hospitalisation de sa maman),
Mesdames et Messieurs les élus, chers collègues,
Mesdames et Messieurs, en vos fonctions, grades et responsabilités,
Cher Germain Druelle, représentant éminent des décorés de l’Ordre du Mérite,
Chère Sophie,
Cher Jean-Pierre,
Être ici avec vous tous ce matin, est à la fois pour moi un moment solennel et émouvant. Solennel car nous sommes réunis parce que la République met à l’honneur deux personnalités, et que si le protocole républicain impose pour cette cérémonie des règles, ici à Wattrelos nous y ajoutons notre marque, par le décor conçu par les services municipaux que je remercie très chaleureusement et par votre présence à tous, pour dire notre fierté de voir deux wattrelosiens (ou « quasiment » Cher Jean-Pierre) décorés. Ce n’est pas anodin que de recevoir une distinction, par décret du Président de la République, distinction qui est celle d’un des deux ordres nationaux.
L’Ordre National du Mérite, créé en 1963 à la demande du Général de Gaulle, est symbolisé par un ruban bleu (choisi par le Général lui-même). Pour reprendre la définition par un ancien Président de la République : « C’est le plus beau symbole du dévouement ; il représente l’adhésion à l’esprit de la République. Il lui donne des visages, des exemples. Il encourage l’émulation et invite les citoyens de notre pays à donner le meilleur d’eux-mêmes ».
Rappelons d’ailleurs que, lorsqu’il fut créé, l’Ordre du Mérite simplifiait les distinctions françaises, car il fusionnait en un ordre unique, 13 ordres du mérite de divers ministères et les 3 derniers ordres coloniaux !
Ainsi – et j’aime bien à chaque cérémonie le rappeler – Chère Sophie et Cher Jean-Pierre, lorsque dans un instant je vous épinglerai ce ruban bleu, vous recevrez en quelque sorte en même temps : l’Ordre du Mérite Social, l’Ordre de la Santé Publique, du Mérite Commercial et Industriel, du Mérite Artisanal, du Mérite Touristique, du Mérite Combattant, du Mérite Postal, de l’Economie Nationale, du Mérite Sportif, du Mérite du Travail, du Mérite Militaire, du Mérite Civil, et même du Mérite Saharien !
Au-delà du sourire que cette liste peut légitimement provoquer, retenons que cette distinction républicaine réunit les générations, les horizons professionnels, les hommes et les femmes (dorénavant a parité, pour chaque promotion, et ce matin à Wattrelos, nous l’illustrons bien : une femme, et quelle femme ! Un homme, et quel homme !), et l’ONM dépasse les origines, les conditions sociales.
Comme l’écrivait ainsi un Président de la République : « Une distinction n’est pas une hiérarchie, non plus qu’une réparation. C’est un instrument d’égalité, une chance offerte à chacun dans l'accès à l’honneur, à la reconnaissance, à la récompense. Tous nos concitoyens, quelle que soit leur place dans la société, doivent pouvoir penser qu’à un moment, la société peut les récompenser pour un acte de bravoure, de générosité, d’engagement, quel qu’il soit ».
Emouvant, ce moment l’est aussi, pour les récipiendaires d’abord bien sûr, mais aussi pour leurs collègues, ou encore pour l’équipe municipale et moi-même car ce sont des « figures » bien connues que je vais épingler dans quelques minutes, des « personnages » de la vie publique wattrelosienne devenus des amis. Et je n’oublie pas non plus que leur médaille leur est remise par mes soins :
- à Sophie Liagre, dans le cadre de l’action entreprise par le CCAS qu’elle dirigeait dans la lutte contre le Covid ;
- et à Jean-Pierre Mollière, à quelques semaines, presque jours, du terme de son parcours professionnel, puisqu’en octobre prochain il fera valoir – s’il ne change pas d’avis – ses légitimes droits à la retraite.
Mais assez parlé du contexte de cette cérémonie, parlons-donc des deux médaillés du jour. Catherine Osson en a déjà dressé un portrait : je vais essayer de ne pas répéter ses propos, mais il y a un risque car je pense que tous deux nous pensons la même chose de nos médaillés, à savoir beaucoup de bien !
Jean-Pierre, tu me pardonneras de parler d’abord de Sophie, galanterie oblige.
● Sophie Liagre n’est pas une habituée du feu des projecteurs, même si la dernière fois que je l’ai vue monter sur cette scène c’était pour Miss Wattrelos (non pas comme candidate, mais comme accompagnatrice de sa fille élue 1ère Dauphine : je préfère préciser). Je n’ignore donc pas que la reconnaissance que cette cérémonie lui donne – reconnaissance de son parcours et de ses qualités humaines – lui fait vivre une situation bien embarrassante, elle qui préfère œuvrer dans l’ombre plutôt que sous les projecteurs.
Aussi, comme je le ferai tout à l’heure pour Jean-Pierre, je vais essayer de te résumer, Chère Sophie, en 3 mots : wattrelosienne ; social ; coeur.
> Wattrelosienne : à mes yeux, c’est la plus grande des qualités, et wattrelosienne elle l’est de plusieurs générations. Wattrelosienne comme ses parents, ses frère et sœur, ses grands-parents maternels, ses arrière-grands-parents qui tenaient un estaminet dans notre bonne ville… De beaux brevets de wattrelosiannité sur le berceau !
Sa vie débute dans une famille de commerçants, dans un environnement déjà fortement tourné vers les associations, ce qui n’est guère étonnant à Wattrelos. L’école primaire effectuée à Léo-Lagrange, au Sapin Vert, le secondaire à Gambetta à Tourcoing, puis inscrite à l’école d’infirmière de la Croix Rouge. Pour Sophie c’est la révélation ! Elle qui était habituée, plus jeune, à porter les courses à domicile chez les personnes âgées et à aider pour le ménage ou la toilette, se découvre une vocation de soignante. Ce ne seront pas les stages programmés dans les services les moins demandés par les stagiaires – notamment à l’hospice rue d’Havré, à Tourcoing – qui la décourageront : son chemin est tracé, elle effectue ses 3 années de formation et boucle sa scolarité en se classant 2ème de sa promotion !
Son stage de fin d’année d’infirmière se déroule en milieu carcéral, à sa demande, au Centre de détention de Loos précisément, où se purgent les peines les plus lourdes. Imaginons Mesdames et Messieurs, la jeune Sophie, blondinette de 21 ans, traversant tout le centre de détention sous le regard attentif de prisonniers pour aller prendre ses fonctions à l’infirmerie ! Il m’a été rapporté que, durant cette période, nombreux furent les détenus à avoir soudain mal au crâne et à ressentir un impérieux besoin de consulter… Cette expérience la touche pourtant profondément, tant elle reçoit de poèmes et de lettres, souvent de détresse, de la part de ses « patients ». Le poste est disponible, on lui propose, mais elle le refuse car sans doute trop impliquant émotionnellement.
> Et c’est la 2ème caractéristique de notre impétrante : son goût profond, sa fibre, son engagement pour le social.
Cette rencontre avec le social, jamais ensuite ne se démentira. Au poste qu’elle occupe à la polyclinique de la Louvière au milieu des années 80, elle doit faire preuve de solidité, de force morale, voire davantage encore : le service oncologie, plus précisément les départements gastrique et pneumologie, ainsi que le service addictologie. La mort y fait partie de son quotidien : quasiment un décès par jour, des patients auxquels on s’attache et qu’il faut se résoudre à voir partir… Sophie ne se ménage guère, et restera à jamais marquée par des situations humainement très compliquées.
En 1986, elle répond à une annonce roubaisienne pour devenir Directrice de foyer-logement pour un nouveau projet au Cul-de-Four, les prémices de nos résidences intergénérationnelles. Nouvelle révélation pour elle : l’accompagnement des personnes âgées. Prenant son travail à cœur, Sophie se trouve assez vite à gérer quatre structures, sous la direction d’un certain Patrick Kanner, alors directeur du CCAS de la Ville de Roubaix.
Au CCAS de Roubaix, elle prend la Direction du service gérontologie en 1992. Quelques années plus tard, devenu maire, je la croise durant une réunion et tout de go je m’étonne « Vous êtes Wattrelosienne et vous travaillez à Roubaix » ? Elle me répond tout aussi directement qu’on ne lui a jamais proposé de travailler à Wattrelos. L’affaire est vite entendue. Jeune maire, je souhaite structurer le Service gérontologie du CCAS de Wattrelos, avec mon Adjointe d’alors Marie José Dens et la voilà donc Directrice. Une Directrice efficace, pendant près de dix ans, de 2002 à 2011, date à laquelle je lui confie la Direction générale du CCAS jusqu’à… eh bien ces dernières semaines, puisqu’à la suite d’un remaniement des directions générales de la Ville que j’ai voulu initier, Sophie est la nouvelle Directrice générale adjointe en charge des fêtes, de la culture, de l’enfance et de la santé.
> Enfin, 3ème mot qui va bien à Sophie Liagre, celui du Cœur, car elle est une femme de cœur, avec cette particularité physiologique d’être à la fois un « petit cœur » (car très sensible) et d’avoir un « grand cœur » (car elle accueille, aide, et soigne les détresses).
Dans ce cœur, là aussi il y a plusieurs ventricules, bien davantage que la faculté de médecine ne les reconnait.
Il y a d’abord et avant tous sa famille. Sa mère dont elle était si proche, dont le départ fut une blessure jamais refermée, et à qui je le sais elle pense très fortement aujourd’hui ; son père, son plus grand amoureux s’il en est, lui aussi si proche, et pour qui elle sacrifie beaucoup, tant elle l’aime ! Ses 2 enfants, Nicolas, qui partage sa vie entre Vancouver et la France, et Alexia, bien connue, ancienne Dauphine, Présidente du Comité Miss Wattrelos, et qui lui aura donné un double bonheur ! Celui d’être infirmière comme sa mère, et un petit Noa qui aura conféré à Sophie, sa plus belle fonction, celle de « mamie » !
Dans son coeur, il y a aussi les autres, tous les autres quels qu’ils soient. Ses collaborateurs, avec qui elle entretient toujours des liens de proximité, dans le travail et parfois dans la vie, et qui pleurent quand elle quitte ses fonctions. « Ses » élus au Nouvel Age : Marie-Jo, Dany et aujourd’hui Michèle et Pascal en attestent, de même que « ses » responsables de clubs.
Mais dans « les autres », il y a aussi toutes ces résidentes, tous ces résidents, anonymes, dont par dizaines, par centaines, elle a été proche, dont elle a tenu la main, « écouté » les douleurs et les problèmes, soigné les plaies physiques ou psychologiques, un altruisme humaniste qui est son engagement personnel et philosophique qui la rend toujours disponible et prête à intervenir. Ma propre mère, si elle était encore de ce monde, en témoignerait, et avec elle tant et tant de personnes âgées qu’un jour, une nuit, elle a relevé, soigné, consolé. Pour ces ainés du Nouvel Age, elle est devenue une référente fidèle, une confidente parfois, une amie souvent. Pour la passion de son métier. Pour l’amour sincère de son prochain surtout.
Dans cette médaille, Chère Sophie, il y a tout cela, tout cet humanisme, toute cette fraternité et cet amour des autres, qu’avec tes équipes – avec qui je le sais, du plus profond de ton cœur, tu partage cet honneur que la République te fait – tu as porté au paroxysme, lors de cette crise sanitaire, présente jour et nuit dans des Résidences de la ville pour lutter contre le Covid et ses terribles conséquences.
Aucun élu de l’Administration municipale n’oubliera jamais cette présentation des mesures anti-Covid mises en œuvre par tes équipes du CCAS sous ton autorité : à la fin de ton exposé, les applaudissements furent spontanés et chaleureux.
La République aussi les a entendus, puisque c’est sur proposition du Ministre des Solidarités et de la Santé que, par décret du 31 décembre 2020, le Président de la République t’aura nommée Chevalier dans l’Ordre National du Mérite. Toutes mes chaleureuses félicitations, Chère Sophie !
● Autre impétrant, M. Mollière « Mollière », comme on l’appelle affectueusement à Wattrelos, Mesdames et Messieurs, n’est ni « Avare » ni « Malade Imaginaire », pas même « Bourgeois Gentilhomme » (quoique…) : non, ce « Mollière »-là s’appelle Jean-Pierre, et il est Inspecteur de l’Education Nationale. C’est « notre » Inspecteur à nous, à Wattrelos !
Et pour nous équipe municipale - il en a usé plus d’un Adjoint aux Ecoles -, ou pour moi - ça, il a toujours eu le même maire, et nonobstant son obligation de réserve, je crois pouvoir dire qu’il s’en félicite ! - pour mon équipe municipale ou pour moi, disais-je, Jean-Pierre Mollière c’est notre « complice ». Mais le complice au sens positif du terme, de ceux qui s’épaulent pour réussir ensemble, pour aller chercher ensemble des sous, pour obtenir ensemble les meilleures décisions. Le complice au sens de ceux qui partagent les mêmes valeurs, les mêmes objectifs, qui veulent les mêmes choses pour nos écoles et pour nos enfants.
D’un travail en commun pour bâtir en commun, sont nés entre nous, Cher Jean-Pierre, une considération réciproque et une amitié peu communes. Lesquelles ne tiennent pas qu’à notre année de naissance identique, 1959, même si c’est objectivement un bon début !
Pour parler de toi, comment faire autrement qu’avec 3 mots aussi : éducation ; Wattrelos ; solidarité.
> L’Education, son leitmotiv, le fil rouge de sa vie, celui de son ménage aussi, car c’est à l’Ecole Normale qu’il a rencontré celle qui deviendra son épouse. Mais derrière l’Education, il y a pour lui l’Enfant, les apprentissages, la citoyenneté, la laïcité, la cité, la lutte contre les inégalités, le soutien, la pédagogie, là aussi comme Sophie la main tendue aux plus faibles, aux « a-normaux » mot qui le révulse, aux marginaux sociaux, culturels, ethniques, aux peuples défavorisés.
L’éducation comme ce qui doit être donné à chaque enfant, pour lui donner les meilleures chances de réussite, quelqu’il soit, d’où qu’il soit et d’où qu’il vienne.
C’est pour cela que Jean-Pierre Mollière croit plus que tout à l’Ecole de la République. Et qu’il va s’y investir, j’ose dire « corps et âme »… ce ne sont pas son épouse et ses proches qui me démentiront.
Plus qu’une vocation, c’est pour lui un engagement. Loin d’être passif dans sa vie, il veut être actif, acteur du changement, acteur de la réussite des plus jeunes.
Très tôt, Jean-Pierre en effet s’investit dans la vie de son village de Quesnoy sur Deûle : l’animation de la jeunesse l’attire. Animateur de centres aérés, puis directeur de centre de loisirs – son âme de responsable s’affirme sans tarder – il fondera par la suite un camp de jeunes, puis deviendra directeur de camp d’adolescents pendant plus de 10 ans.
Il le sent, il en est convaincu : il vouera sa vie professionnelle à la jeunesse, et comment mieux la servir qu’en intégrant l’Education nationale ? C’est tout naturellement qu’après le Bac, après un service militaire effectué dans l’infanterie de marine où il goûtera, à Mont-de-Marsan et à Pau, aux joies de la chute libre et du parachutisme – j’y reviendrai – il vise l’Ecole normale et obtient brillamment le concours, se classant parmi les premiers !
Son premier poste l’éloigne un temps de la métropole : il intègre un institut d’éducation motrice à Coudekerque-Branche, premier contact avec le handicap qui correspondra à son investissement professionnel pendant vingt ans. Mais l’éloignement rend l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle délicat : jeune marié, Jean-Pierre est également jeune papa (de Julien, né en 1980 : pour les puristes des dates, vous remarquerez qu’il est même très jeune papa !). Il demande donc un poste dans la métropole, un poste de remplaçant, ce qui attire l’attention de l’inspecteur. Mais pourquoi un Normalien se positionne-t-il sur un poste de remplaçant ?
Eh bien, parce que Jean-Pierre est un homme de mission, déjà à l’époque. Une mission nouvelle l’attend, elle se crée. Un texte de loi de l’Education nationale la définit au début des années 80 : il s’agit d’intégrer les enfants porteurs de trisomie 21. Jean-Pierre est volontaire : il y accompagne dans les écoles du secteur de Roubaix une petite dizaine d’enfants à Roubaix, Willems et, je vous le donne en mille, à Wattrelos, à l’école maternelle Jacques-Brel.
Dans le cadre de cette mission, il collabore avec le CAMSP de Roubaix, où il rencontrera celui qui sera un de nos grands amis communs le docteur Maurice Titran, célèbre pédiatre. Ni Jean-Pierre, ni moi n’avons oublié notre émotion en inaugurant à Beaulieu, en 2010, le Centre Maurice-Titran en présence de son épouse et de ses filles. Un grand homme, assurément. Et né à Wattrelos, de surcroît.
Jean-Pierre obtient son diplôme d’enseignant spécialisé en 1985. C’est l’époque où les maires de Roubaix et de Tourcoing réclament au Garde des Sceaux des mesures pour gérer les cas de jeunes délinquants multirécidivistes qui empoisonnent le quotidien. Il y a là un nouveau cheval de bataille pour Jean-Pierre : en lien avec l’association Le Gîte, chargée de proposer une alternative à l’incarcération, il accompagne ces adolescents, en sa qualité d’instituteur, pendant deux ans. Il les emmène par exemple pratiquer l’escalade, ce qu’il appelle « une conduite à risque socialement acceptable ».
Poursuivant par ailleurs sa collaboration avec le CAMSP, il travaille pour des familles connaissant des situations complexes, puis devient conseiller pédagogique, puis conseiller pédagogique départemental, plus particulièrement en charge des questions d’enseignement aux enfants relevant d’un handicap – le voilà rendu à son orientation professionnelle initiale.
Dans cette nouvelle fonction, il crée un système d’enseignement à domicile pour les enfants malades ou accidentés (qui existe toujours) ; il est aussi chargé de mission pour la scolarisation des enfants du voyage à la fin des années 90 et… c’est là que la rencontre avec Wattrelos prend corps.
> Oui Wattrelos car à l’époque Wattrelos est l’une des quatre villes de la Communauté urbaine de Lille à respecter la loi Besson portant obligation aux communes de plus de 5 000 habitants de disposer d’une aire d’accueil. Naturellement, l’une des écoles de Wattrelos accueille ces enfants du voyage : il s’agit de l’école Brossolette, dirigée par une certaine Catherine Osson…
Au fil de ses visites pédagogiques et de ses formations, un inspecteur de l’Education nationale dit alors à Jean-Pierre : « Toi, tu es de la graine d’inspecteur… ». Il ne faut pas le lui dire deux fois : Jean-Pierre passe le concours en 2002 et entre en fonction en 2003 !
Au vu de son passé, on l’attend sur une circonscription spécialisée. Lui répond : surtout pas, un inspecteur est en charge de tous les enfants de l’école de la République ! C’est sur le terrain qu’il veut s’investir, dans un environnement où les besoins sont plus forts qu’ailleurs, où l’on parle d’éducation prioritaire, où l’on a besoin de lui. Plus qu’un engagé Jean-Pierre est un militant de la cause éducative.
Voilà pourquoi il choisit Wattrelos ! Il n’y avait pas alors d’inspecteur titulaire ; avec lui, il y en a dorénavant un. Nommé en 2003, il ignore alors qu’il y fera toute sa carrière d’Inspecteur.
Je ne peux m’empêcher de sourire en repensant à ce jeune Inspecteur, présidant à mes côtés les cérémonies annuelles de départ en retraite des enseignants, cérémonie à l‘époque très fréquentée, où il devait retracer la carrière de celles et ceux qui partaient en retraite. Et Jean-Pierre Mollière s’étonnait alors, et se tournait vers moi, de la longévité de carrière de ces enseignants, et directeurs, à Wattrelos… et moi de lui répondre : « Monsieur l’Inspecteur, Wattrelos un jour, Wattrelos toujours ! »
Eh bien, il n’a pas fait mieux que les autres ! Ses 17 ans de fonctions d’Inspecteur, c’est à Wattrelos qu’il les aura vécues. C’est dire si c’est un « monument » de la cause éducative que nous voyons partir.
Et le destin lui aura joué bien des tours.
D’abord d’avoir été affecté dans une ville où, ici, d’Henri Briffaut à Alain Faugaret tout au long du XXème siècle, de maire en maire, d’équipe municipale en équipe municipale, l’éducation, le renforcement du capital humain de ces filles et fils de catégories sociales modestes qui n’ont pas de capital financier en héritage, est , qui n’ont pour réussir que leurs talents et leur intelligence, a toujours été le premier des investissements municipaux, le premier des budgets, la première des priorités.
Ensuite, dans la rencontre dès juillet 2003 de ta première directrice d’école à Wattrelos, une jeune maman qui se présente avec son bébé : le bébé s’appelle Emma, la maman Catherine, celle-là même qui, des années plus tard, deviendra Députée, chargée des Crédits de l’Education Nationale à la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale et qui, poursuivant une démarche que j’avais entreprise, obtiendra du Ministre de l’Education Nationale, par décret du 15 novembre 2018, que Jean-Pierre Mollière soit fait Chevalier dans l’Ordre National du Mérite.
Enfin, parce qu’ici, Cher Jean-Pierre tu te mets à travailler avec un maire qui te ressemble beaucoup : même souche familiale ouvrière, même culture de l’effort, de la passion du travail, des journées qui commencent tôt et finissent tard, même réussite personnelle grâce à l’école de la République. L’école de la République qui fut toute ta vie !
Ensemble, nous l’avons voulu, Ville et Eduction nationale ont travaillé en « coproduction » : pas l’un au-dessus de l’autre, l’un avec l’autre, dans les idées comme dans la mise en œuvre. Et des chantiers on en aura mené pour les enfants de Wattrelos, avec et grâce à toi. Education artistique, Enfance de l’Art, éducation sportive, le retour à la piscine, les phases d’informatisation, les travaux, les rythmes scolaires, les plans éducatifs, la Réussite Educative, les Clubs Coup de Pouce, l’application des réformes que tu as toujours apaisé lorsqu’elle pouvait avoir des angles saillants, et surtout ces négociations parfois ardues avec ton Administration chaque année pour les mesures de carte scolaire où, malgré parfois des réductions d’effectifs d’élèves, grâce à ton habileté nous évitions des fermetures ou obtenions des postes supplémentaires, voire des ouvertures ; la rentrée 2021 le prouvera encore.
Aussi, plus que tout long discours laudatif, pour tout cela, le Maire te dit, M. l’Inspecteur un vibrant MERCI !
> Enfin, je ne peux conclure ce discours sans évoquer, rapidement même si cela mériterait d’en parler davantage, le 3ème mot qui te caractérise : la Solidarité.
Car le militantisme de Jean-Pierre ne s’arrête pas à la porte de l’école, ou de l’inspection : il est engagé – à de « petites fonctions » - dans plusieurs associations :
- il est Président départemental de l’ADSSEAD, qui a fusionné il y a huit ans avec La Sauvegarde du Nord : l’association accueille et accompagne les enfants et ados connaissant des difficultés psychologiques, scolaires, familiales ou sociales, ainsi que les adultes éloignés de l’emploi, les familles et les personnes en grande précarité. Une structure qui emploie quelque 1 500 salariés dans le Nord.
- il est Président Départemental de l’OCCE (Office Central de la Coopération à l’Ecole) qui gère les coopératives scolaires, un organisme complémentaire à l’Education nationale qui permet de développer des projets pédagogiques œuvrant à l’éducation à la citoyenneté.
- et enfin, qui l’ignore, ce Ch’ti est, curieusement le Président club alpin français, basé à Lille depuis 30 ans, ses grandes passions étant, depuis son passage par l’armée que j’évoquais tout à l’heure, la montagne, l’alpinisme, le parapente, la chute libre, mais aussi les randonnées à ski.
Se lancera-t-il demain, une fois libéré de ses obligations professionnelles dans l’escalade du toit de l’Europe comme, il y a quelques jours un jeune Wattrelosien ? J’espère qu’il, va surtout chouchouter ses trois petits-enfants Céleste, Cyprien, Agnès, filles et fils de ses deux enfants Julien et Marie.
Chacun l’aura compris, ce n’est pas un discours d’hommage à un néo-retraité que je suis en train de terminer mais un discours d’hommage à un humaniste, un homme d’honneur qui a su porter haut sa mission d’enseignant, de conseiller pédagogique et d’inspecteur, un homme féru de Jaurès et lecteur de sa « Lettre aux instituteurs » de 1888 qui sait qu’un enseignant tient « dans ses mains l’intelligence et l’âme des enfants », engagé dans son métier comme dans la vie associative, un homme au service des autres et d’un idéal de fraternité, d’égalité, de justice sociale, la République chevillée au cœur, un homme apprécié de tous et dont on se souviendra ici avec émotion avoir croisé sa route.
Cher Jean-Pierre, je fais indéfectiblement partie de ceux-là !
Vous unir tous deux, Chers médaillés dans une même cérémonie, se veut symbolique. Jean-Pierre est à l’éducation ce que Sophie est aux ainés : l’un et l’autre se caractérisent par l’intensité de leur engagement, militants infatigables de la cause qu’ils portent au fond d’eux pour qu’elle soit reconnue. Ce sont une femme et un homme qui, l’un comme l’autre, « en même temps » comme le dirait le Président de la République Emmanuel Macron, qui a signé votre décret de nomination, auront servi la République et l’humanisme.
Sincères, très sincères félicitations, à tous deux !