Franchement, parmi les responsables socialistes, je ne fais pas partie de ceux qui considérent comme indispensable, ni même utile, un accord avec les Verts, ni sur le fond (et la question du nucléaire) ni sur le plan électoral.
Pourquoi ? Parce que je considère que, dans la logique de la Ve République, c’est l’élection présidentielle – clé de voûte de la démocratie – qui détermine les rapports de force entre les formations politiques, et donc que c’est logiquement sur la base des équilibres issus du 1er tour de l’élection que se déterminent les contours de la politique conduite, mais aussi ceux de la majorité présidentielle, donc gouvernementale, donc parlementaire.
J’ignorais pour autant que je serai, dans le Nord, la victime de cet accord et de son volet électoral. De fait, je ne l’accepte pas !
Certes, bien sûr, je savais depuis plusieurs semaines que les Verts avaient demandé une circonscription dans le Nord et que la 8e en faisait partie ; plusieurs étaient demandées, y compris des circonscriptions qui n’avaient pas ou plus de titulaires sortants. J’avoue ne pas avoir pensé une seule seconde que mon parti (que j’ai servi et aimé fidèlement depuis 34 ans !) et que ma fédération (que j’ai appuyée depuis autant de temps), me lâcherait (pardon : me trahirait !), en m’offrant en pâture en contre-partie de tripatouillages pour des intérêts particuliers lillois et roubaisiens (qui ne sont d’ailleurs que marchés de dupes !).
Et que nul n’ait eu l’obligeance de me dire qu’il s’agissait là de la proposition-même de la Fédération du Nord, et que j’apprenne – après la tenue du Bureau national ! – dans l’hémicycle à plus de 22 heures, par le 1er secrétaire de la fédération de Paris (!) de retour du BN, que c’est ma circonscription qui a été gelée pour les Verts (alors même que je suis en train de siéger pour défendre jusqu’à 2 h 30 du matin des amendements à la loi de finances de l’AMGVF voulus et soutenus par Martine Aubry elle-même !), c'est pour moi particulièrement choquant.
Mais par-delà l’indécence de la forme, le fond de cette décision qui m’affecte est également inacceptable !
On ne m’autorise pas à me représenter. Je suis le sacrifié sur l’autel de l’accord avec les Verts. Pourquoi ?
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D’abord parce que les Verts veulent une circonscription gagnante ! En effet, dans le Nord, la 8e est l’une de celles qui votent le plus à gauche. Et alors ? C’est cela le courage en politique ? Moi, cette 8e circonscription, avant qu’elle ne soit redécoupée, je suis allé la gagner, en 1997 d’abord (notamment contre le numéro 2 du Front National, Carl Lang !), puis en 2007 : on ne me l’a pas donnée toute cuite ! Je me souviens de la joie des copains de Wattrelos, Roubaix, Croix et Wasquehal quand nous l’avons reprise.
Et maintenant, il faudrait qu’on la donne ? Parce que les Verts veulent une circonscription où ils sont certains de gagner (on les comprend !), sans candidat socialiste de préférence (c’est encore mieux !)… Il faut qu’on leur donne bulletins de vote et électeurs ?
Mais on n’achète pas une circonscription comme on est nommé à la tête d’une agence d’intérim ou d’un bureau de poste ! Ce sont des hommes et des femmes libres, électeurs, qui ont, avec leur élu et celui-ci avec eux, des relations étroites, de proximité. Cela s’appelle un ancrage.
De plus, le courage en politique - et les Verts auraient pu, auraient dû le faire, et je les aurai soutenus fermement - c’est d’aller à la conquête d’une circonscription gagnable, susceptible de basculer pour renforcer la gauche d’un siège de plus… plutôt que de s’asseoir dans le fauteuil d’un autre !
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Le sacrifice qui est demandé aux militants socialistes wattrelosiens et roubaisiens est d’autant plus inacceptable que dans l’agglomération, ici, on a déjà donné ! En 1997, la 7e circonscription (celle de Jules Guesde !) avait été donnée à un Vert, Guy Hascoët ! Mais il avait tellement fait peu de cas du terrain et des électeurs que celle-ci, réputée imperdable à gauche, a été gagnée par la Droite qui l’a gardée depuis ! Une vraie réussite ! Est-ce cela que l’ont veut recommencer ? Sauf que cette fois, ce n’est plus la Droite mais le FN qui dans la 8e est en embuscade !
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Derrière les législatives, il y a d’autres enjeux, d’autres arrangements sans doute. On les devine plus qu’on ne les connaît. Mais il est deux remarques dont nul ne peut contester la vérité :
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la première, c’est que c’est à un opposant à la Municipalité de Roubaix que l’on veut donner un siège de député ! Depuis quand le parti socialiste a-t-il pour stratégie de faire élire députés ceux qui s’opposent, parfois farouchement, aux maires socialistes locaux ?
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la seconde, c’est que ce choix va faire payer à Roubaix ce que Lille n’a pas voulu et ne veut pas payer… puisque, rappelons-le, la demande première des Verts portait non pas sur la 8e mais sur la 2e circonscription !
Et cela, ni comme député de Roubaix ni comme maire de Wattrelos, je ne peux l’accepter.
Telles sont quelques-unes des raisons (mais quelques-unes seulement car je pourrai aussi
évoquer ce que, depuis plus de quatre ans, j’ai pu faire sur le terrain ou à l’Assemblée) pour lesquelles je ne peux valider cet arrangement électoral, ni ce soir ni demain ! Face à une telle situation me revient une maxime de George Sand : « Les déceptions ne tuent pas, les espérances font vivre »...